Brevets et innovation pharmaceutique en Chine

Voici un panorama de l’innovation pharmaceutique en Chine, stimulée par le gouvernement chinois qui favorise entre autres la mise sur le marché de nouveaux médicaments et leur protection par brevet.

médicaments
Les Directives du SIPO autorisent, lors de l’examen de brevetabilité, la prise en compte de résultats expérimentaux fournis après le dépôt de la demande.

Selon un rapport de l’institut Mc Kinsey d’octobre 2015 (The China effect on Global Innovation), la moitié des objectifs annuels de croissance du PIB de la Chine ne pourront être atteints que par l’innovation (soit 2 à 3% sur les 5,5 à 6,5% visés).

L’approche de la Chine a évolué de façon spectaculaire ces dernières années dans le domaine de l’innovation, puisque par exemple le pays est devenu le 4ème déposant de brevets en Europe, avec une entreprise chinoise se classant au 5ème rang des déposants ; le nombre de dépôts de demandes de brevet auprès de l’office chinois (SIPO) a également explosé, avec 928.000 dépôts de brevets en 2014, dont 13,7% en provenance de l’étranger. Cependant, la situation est contrastée selon le domaine technique, les plus forts progrès ont été enregistrés dans le numérique, l’informatique et les télécommunications.

Parmi les 4 grands modèles d’innovation identifiés par Mc Kinsey, celui pour lequel la science est le moteur principal (« science based » innovation), dont font partie la création de médicament et la pharmacie au sens large, ne parait pas encore aussi compétitif que les autres pour le moment en Chine. Néanmoins, le dynamisme de ce secteur et les mesures du gouvernement devraient faire rapidement évoluer la tendance.  

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Propriété intellectuelle et industrie automobile en Chine

Voici une introduction générale sur la protection de la propriété intellectuelle dans le domaine de l’industrie automobile en Chine et une présentation des principaux outils disponibles pour se protéger.

Cet article a été initialement rédigé en anglais par le China IPR SME Helpdesk.

La protection des droits de propriété intellectuelle dans l’industrie automobile en Chine

Votre propriété intellectuelle (PI) dans l’industrie automobile chinoise

L’industrie automobile en Chine a connu une expansion rapide durant la dernière décennie ; la valeur du seul marché des pièces automobiles était de 1,5 trillions RMB (179 milliards d’euros) en 2010, et le volume croissant des ventes de véhicules automobiles dans le pays indique que la tendance devrait se poursuivre. Il existe des possibilités évidentes pour les entreprises européennes pour tirer profit de ce marché en plein essor, mais des mesures de précaution doivent être prises pour relever les défis que pose la Chine.

Lorsqu’il s’agît de protection de propriété intellectuelle (PI), les entreprises internationales de petite à moyenne taille, qui investissent dans l’industrie automobile locale, devraient avoir conscience des risques de propriété intellectuelle qu’ils encourent lorsqu’ils opèrent en Chine, et les principaux outils à leur disposition pour se protéger contre ces risques.

Actuellement, les facteurs les plus importants qui permettent aux entreprises automobiles internationales d’exercer leurs activités sur les marchés chinois de niveaux 1 et 2, sont leurs contacts établis avec les constructeurs automobiles mondiaux ou les fabricants d’équipement d’origine ou OEM (« Original Equipment Manufacturers »), qui produisent des pièces ou des composants vendus à d’autres constructeurs sur le marché sous leur propre marque – pour des informations complémentaires vous pouvez consulter « China IPR SME Helpdesk webinar on OEM in China » ), leurs capacités technologiques, et leur réputation en termes de qualité. Ceci leur confère un avantage sur beaucoup de concurrents chinois qui sont relativement nouveaux et qui manquent de processus réglementés exigés pour garantir un niveau de qualité élevé. Par conséquent la propriété intellectuelle, en particulier à l’égard des nouvelles technologies et de la capacité à protéger ces technologies des concurrents chinois, sera un facteur clé dans la bataille pour le partage du marché.

Pourquoi est-il important de protéger votre marque ?

La stratégie en matière de marque est la clé du succès de nombreuses sociétés internationales dans l’industrie automobile chinoise. La forte réputation que ces sociétés ont construite dans d’autres marchés leur permet d’être compétitives pour des commandes de clients (internationaux) basés en Chine. Les marques jouent un rôle relativement réduit lorsqu’il s’agît d’acheter à des OEMs, car la plupart des constructeurs automobiles n’achète seulement qu’à des fournisseurs connus, ainsi il est peu vraisemblable que des contrefacteurs puissent s’établir à ce niveau. En aval de la chaîne de fournisseurs, la contrefaçon de marque est plus manifeste, et les PME européennes opérant à ce niveau devraient s’assurer que leurs marques sont enregistrées en Chine.

Un autre domaine sujet à la contrefaçon de marque est le marché des pièces de rechange. Des distributeurs de pièces, grossistes ou détaillants, vendraient des produits contrefaisants aux prix de produits authentiques, augmentant sensiblement leur propre marge. D’un point de vue du consommateur, la meilleure façon de limiter le risque de se voir fournir des produits contrefaisants de moindre qualité, est d’acheter uniquement à des concessionnaires qualifiés.

Les équipementiers automobiles dont les pièces sont copiées devrait être prêts à déposer une plainte devant l’administration pour l’industrie et le commerce (AIC ), afin de lancer des mesures d’exécution administrative en propriété intellectuelle, ou dans le cas de violations majeures, un procès civil pouvant entraîner une injonction (un ordre judiciaire requérant que le contrefacteur cesse immédiatement la vente et la production des articles contrefaisants) et éventuellement une compensation.

Les sociétés de l’industrie automobile doivent garder à l’esprit d’enregistrer leurs marques en Chine – ne serait-ce que pour éviter que des tiers ne les enregistrent en premier. Comme la Chine applique le système du « premier déposant », une entreprise internationale qui manque d’enregistrer son nom commercial comme marque en Chine, pourrait se voir empêcher d’utiliser ce nom commercial à l’avenir, ce qui pourrait avoir un impact grave sur son activité. En outre, les propriétaires doivent enregistrer les versions chinoises de leurs noms commerciaux comme marques en Chine, car très souvent, l’équivalent chinois devient plus connu et plus précieux que la marque d’origine. Pour plus d’information sur les marques en Chine et comment les enregistrer, voir « the China IPR SME Helpdesk guide to trade mark protection in China ».

Brevets et inventions

Le système chinois des brevets est relativement complet et très similaire à ceux de nombreuses autres juridictions internationales. Pour être protégée, selon la loi chinoise des brevets, une technologie doit être enregistrée en Chine, soit directement soit par dépôt d’un brevet international en Chine. Après avoir été délivré, le titulaire d’un brevet aura le droit d’interdire aux tiers de fabriquer, d’utiliser, de vendre, d’offrir à la vente ou d’importer des produits ou des technologies brevetées en Chine pendant la période de validité du brevet.

Les trois conditions principales pour obtenir la délivrance d’un brevet sont que la technologie doit être « nouvelle », « inventive », et avoir une application industrielle. Dans l’industrie automobile chinoise, l’exigence de nouveauté est de loin la plus difficile à satisfaire [Note de la traduction : c’est de moins en moins le cas toutefois, l’activité inventive étant aussi contestée]. Les entreprises qui développent une nouvelle technologie, en Chine ou ailleurs, doivent s’assurer qu’une demande de brevet est déposée en Chine avant l’utilisation du produit ou avant publication (dans le monde entier) Cependant, heureusement, la Chine offre une période de priorité de douze mois après le dépôt d’une demande de brevet dans un autre pays ou une autre juridiction. Cela signifie que lorsqu’une technologie est inventée et qu’une demande de brevet est déposée dans la juridiction de résidence, alors l’entreprise a douze mois pour également déposée une demande de brevet en Chine.

En outre, la Chine a des règles spéciales qui s’appliquent lorsqu’une technologie est inventée en Chine. Si la filiale chinoise d’un fournisseur de pièces automobiles a inventé la technologie, alors la demande de brevet doit être déposée en premier en Chine. Pour de plus amples informations concernant le dépôt et l’utilisation des brevets en Chine, merci de se référer au document « the China IPR SME Helpdesk Guide to Patents in China ».

Accès à une protection supplémentaire et plus rapide – Modèle d’Utilité

En plus de déposer une demande de brevet d’invention, les entreprises ont également la possibilité de déposer des modèles d’utilité pour protéger leurs technologies. Bien que le modèle d’utilité couvre essentiellement les mêmes types de technologies que le brevet d’invention, les différences principales sont les suivantes :

  • Demande : les demandes de modèle d’utilité ne comportent pas d’examen approfondi, ce qui signifie que l’Office de la Propriété intellectuelle de l’Etat (SIPO) n’a pas besoin de vérifier [Note de la traduction : entre autres critères] la nouveauté.
  • Durée : habituellement, le processus de délivrance d’un modèle d’utilité prend environ un an (généralement trois ou plusieurs années pour un brevet d’invention), mais la protection est acquise pour seulement dix ans (à partir de la délivrance).
  • Protection : Contrairement aux brevets d’invention, le modèle d’utilité ne nécessite pas « d’examen approfondi », ce qui les rend moins efficaces lorsqu’il est appliqué et exposé à des risques plus important d’invalidation. Une procédure d’invalidation peut suspendre toutes mesures d’exécution.

Les modèles d’utilité ne sont pas des alternatives aux brevets d’invention, mais ils offrent néanmoins un certain niveau de protection si le brevet d’invention n’est plus accessible pour le propriétaire. En outre, une stratégie efficace pour protéger les solutions techniques, consiste à déposer à la fois un modèle d’utilité et un brevet d’invention (c’est-à-dire le même jour [Note de la traduction : le dépôt de modèle d’utilité peut également être effectué peu après le dépôt de demande de brevet]) ; puis à abandonner le modèle d’utilité lorsque le brevet d’invention est délivré. Cette pratique permet aux titulaires des brevets de profiter de la délivrance précoce du modèle d’utilité pour obtenir un premier niveau de protection, jusqu’à l’achèvement de la procédure de délivrance du brevet, ce qui offre au titulaire du brevet une protection maximale et pour une période plus longue (de vingt ans au lieu de 10).

Comment maintenir les secrets industriels

Le compromis pour la protection des inventions par modèles d’utilité et brevets est que ces derniers sont entièrement divulgués au public, à travers la publication réalisée par l’office de la propriété intellectuelle de l’état. Par conséquent, alors que protéger une technologie par brevet offre une protection juridique en Chine, ceci augmente également le risque que des concurrents soient capables de copier cette technologie. Une approche différente pour protéger les technologies consiste à ne pas requérir une protection par brevet, mais à essayer de protéger l’utilisation de ces technologies en évitant leur divulgation à des tiers.

Message à retenir

L’industrie automobile implique une large gamme de propriété intellectuelle, incluant marques, brevets et secrets industriels. Indépendamment du type de propriété intellectuelle, la première étape pour le titulaire, consiste à s’assurer que les droits de PI sont valides et en vigueur en Chine. Pour les marques et les brevets cela signifie qu’ils doivent être enregistrés/déposés en Chine, et pour les secrets industriels (un type d’informations confidentielles), des mesures doivent être prises activement.

En général, la stratégie de protection de propriété intellectuelle devrait être claire pour toutes les entreprises automobiles qui sont en Chine ou qui veulent pénétrer sur ce marché, ce qui devrait inclure une compréhension nette de la PI qu’ils veulent protéger, et des mesures prises pour exécuter une telle protection.

China Helpdesk

The China IPR SME Helpdesk is a European Union co-funded project that provides free, practical, business advice relating to China IPR to European SMEs. To learn about any aspect of intellectual property rights in China, including Hong Kong, Taiwan and Macao, visit our online portal at www.china-iprhelpdesk.eu. For free expert advice on China IPR for your business, e-mail your questions to: question@china-iprhelpdesk.eu. You will receive a reply from one of the Helpdesk experts within three working days. The China IPR SME Helpdesk is jointly implemented by DEVELOPMENT Solutions, the European Union Chamber of Commerce in China and European Business Network (EBN).

Traduit de l’anglais vers le français par Benoît ANDRIEUX, du cabinet LLRllr_new

 

Vous avez dit Patent Troll ? Non, Trademark Troll !

Dans le monde de la propriété industrielle, nous connaissons le phénomène du Patent Troll, mais celui du Trademark Troll est moins répandu.

Pour rappel, ce terme qualifie la personne, physique ou morale, qui dépose un brevet ou, en l’occurrence, une marque sans avoir réellement l’intention de l’exploiter, dans le but de l’opposer à des tiers et de les menacer d’une action en contrefaçon pour les convaincre de prendre une licence, bien entendu payante, sur le titre en question, voire de l’acquérir.
Leur principale caractéristique est donc de ne produire aucun bien ni service. La concession de licence et le les actions en contrefaçon constituent leur principale activité économique.

Dans le domaine des marques, trois situations peuvent se présenter :

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Du nouveau dans la propriété intellectuelle francophone

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Karlo Fonseca Tinoco, co-directeur de la Revue Francophone de la Propriété Intellectuelle

Alors que notre blog se concentre sur la propriété intellectuelle en Chine, d’autres acteurs du monde juridique ont à cœur de faire rayonner la pensée francophone de la propriété industrielle en général. La Revue Francophone de la Propriété Intellectuelle (RFPI) est née récemment à cette fin. Nous en sommes ravis, d’autant plus que ce sera l’occasion de commenter en particulier le droit chinois de la propriété intellectuelle. Voici une interview de l’un des directeurs de cette revue, Karlo Fonseca Tinoco, docteur en droit et avocat au Barreau de Sao Paulo, Brésil. 

– Pouvez-vous présenter quel est l’objet de la revue francophone de la Propriété Intellectuelle ? 

La Revue Francophone de la Propriété Intellectuelle (RFPI) a été conçue comme un instrument de diffusion de la culture juridique francophone en matière de droits de propriété intellectuelle. Elle s’insère dans un projet visant à permettre aux acteurs de la propriété intellectuelle d’avoir accès à l’actualité juridique des diverses régions du monde, en langue française. La RFPI est une revue bi-annuelle qui s’intéresse à l’actualité juridique. De ce fait, nous pouvons y trouver des articles de fond et de chroniques de jurisprudence touchant aux sujets d’actualité dans tous les continents du monde.


– Pourquoi avoir lancé une telle revue, quelle différence avec les revues existantes sur la propriété intellectuelle ? 

Le lancement de la RFPI par l’Association Francophone de la Propriété Intellectuelle est le fruit de la constatation de l’absence d’une revue en langue française permettant d’avoir une vision globale des enjeux contemporains en matière de droits de propriété intellectuelle dans toutes les régions de la planète. Nous pouvons affirmer que son ouverture vers le droit étranger différencie la RFPI des autres revues existantes sur la propriété intellectuelle, chaque numéro étant composé, de manière équilibré, d’articles concernant les droits nationaux ou régionaux dans chaque continent de la planète. Par ailleurs, la RFPI est une revue électronique intégralement en accès libre, ce qui la différencie également des autres revues existantes sur la propriété intellectuelle.


– Qu’est-ce que l’AFPI ? 

L’Association Francophone de la Propriété Intellectuelle résulte de l’initiative d’un groupe d’universitaires, chercheurs, industriels, conseils en propriété industrielle et avocats ayant pour objectif commun le rayonnement de la culture juridique francophone en matière de droits de propriété intellectuelle.

À vocation internationale, l’AFPI renforce la présence francophone dans les débats concernant les sujets d’actualité en propriété intellectuelle aux niveaux nationaux, régionaux et international. Dans ce cadre, l’AFPI réalise divers projets à d’envergure internationale, tels que l’organisation de conférences, la publication d’une revue et d’ouvrages avec le concours de partenaires universitaires et institutionnels étrangers.


– Est-ce que des articles seront prévus sur la propriété intellectuelle en Chine ? 

Le comité éditorial de la RFPI reçoit des propositions d’articles traitant des enjeux contemporains en matière de droits de propriété intellectuelle dans plusieurs pays d’Asie. La Chine, par son importance dans l’économie globale, a certainement une place d’honneur dans l’avenir de la RFPI. Nous espérons pouvoir partager avec nos lecteurs les discussions et les avis des spécialistes sur les derniers développements en droit chinois de la propriété intellectuelle.


– Avez-vous dores et déjà des projets en lien avec la Chine ? 

Comme nous l’avons précédemment évoqué, l’AFPI a pour objectif de renforcer la présence de la francophonie juridique dans les débats en matière de droits de propriété intellectuelle. Afin de réaliser cet objectif, l’AFPI organise de conférences permettant de rassembler universitaires, chercheurs, industriels, conseils en propriété industrielle et avocats pour débattre, dans une perspective comparée, des enjeux et solutions présents dans chaque pays. Dans ce cadre, en partenariat avec nos homologues chinois et avec le soutien des organisations françaises et européennes partenaires de l’AFPI, nous envisageons la réalisation prochainement d’un cycle de conférences en Chine.

Propos recueillis par Clémence VALLEE-THIOLLIER, du cabinet LLRllr_new

Faut-il enregistrer ses marques lorsque l’on ne prévoit pas de les exploiter ?

Faut-il enregistrer ses marques dans des pays où l’on ne prévoit pas de les exploiter ?

C’est une question qu’il est légitime de se poser au vu de la récente mésaventure rencontrée par St-Hubert, chaîne de rôtisserie québécoise. Elle a appris que son logo est apposé sur des paquets de biscuits fabriqués par une entreprise en Chine, pays dans lequel le logo n’a pas été enregistré en tant que marque puisque la chaîne n’y est pas présente.

Les restaurants de la chaîne St-Hubert sont pour la plupart établis au Québec, c’est la raison pour laquelle le logo de l’entreprise a fait l’objet de l’enregistrement de marques au Canada comme en atteste cette interrogation de la base de données sur les marques de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Ces marques concernent principalement les classes 29 (viande, poisson, volaille et gibier), 30 (café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédanés du café) et 43 (services de restauration (alimentation) ; hébergement temporaire).

Comme le rapporte cet article du site internet du journal « Les Affaires », St-Hubert a récemment constaté qu’une entreprise chinoise, dont l’identité n’a pas été révélée, utilisait son logo. Ce dernier serait apposé sur des paquets de biscuits destinés aux consommateurs chinois. Cette utilisation se faisant sans l’autorisation de la chaîne de restauration, cette dernière a demandé à cette entreprise chinoise la cessation de cette pratique pouvant nuire à son image.

Mais l’entreprise chinoise devait-elle demander à St-Hubert l’autorisation d’utiliser ce logo pour commercialiser des biscuits en Chine ? Ce que l’on peut dire, c’est que l’entreprise québécoise ne peut pas utiliser ses marques canadiennes pour s’opposer à cette utilisation. On rappelle à cet effet qu’une marque a une portée territoriale, ce qui signifie qu’elle procure des effets uniquement sur les territoires dans lesquels elle a été enregistrée.

Au surplus, la commercialisation des paquets de biscuits en Chine ne parait pas avoir d’effet négatif direct sur l’activité du restaurateur québécois. Aussi, sauf à ce que cette société chinoise exporte ses produits sur un territoire où St-Hubert dispose de droits de propriété intellectuelle, ce dernier dispose de peu d’armes en Chine qui pourraient dissuader l’entreprise chinoise de continuer à utiliser le logo arborant un poulet paré d’un nœud-papillon.

Comment St-Hubert aurait-il pu se prémunir de ce désagrément ? A posteriori, si le logo avait fait l’objet de l’enregistrement d’une marque en Chine pour les mêmes classes qu’au Canada et visant en particulier les biscuits ou des produits similaires, le restaurateur aurait pu faire valoir ce titre en arguant que la commercialisation des paquets de biscuits constitue une contrefaçon de la marque. D’ailleurs, la marque en elle-même aurait pu dissuader l’entreprise chinoise de lancer ses paquets de biscuits si elle avait été portée à sa connaissance.

Mais avant cette mésaventure, il était difficile de prévoir que le logo serait utilisé dans un pays où aucun restaurant St-Hubert n’est implanté. Et enregistrer toutes ses marques dans un maximum de pays ne semble pas être une solution intéressante, puisque la gestion d’un portefeuille de marques dans un grand nombre de pays s’avère très onéreuse. Enfin, et surtout, une marque est un signe distinctif qui a vocation à être exploité. En effet, à défaut d’exploitation par son titulaire pendant une période consécutive de 3 ans en Chine (5 ans en France et en Europe), un tiers intéressé pourra engager une action en déchéance de la marque. En l’espèce, St-Hubert, qui n’est pas implanté en Chine, n’aurait pas pu se prévaloir de sa marque sans risquer la déchéance de ses droits sur celle-ci.

Pour répondre à la question posée dans le titre de cet article, plusieurs paramètres entrent en jeu. Cela revient notamment à trouver un compromis entre l’importance du budget alloué à la gestion de son portefeuille de marques et l’importance de l’image que l’on souhaite donner à ses marques.

Une stratégie peut être d’enregistrer au moins sa marque « phare » dans un grand nombre de pays, tout particulièrement en Chine. Toutefois, cette stratégie a ses limites compte tenu de l’obligation d’usage de la marque que nous décrivions précédemment. Une telle stratégie n’a donc qu’un intérêt à court terme, pour anticiper son implantation dans un nouveau territoire par exemple.

La contrefaçon de vin en Chine (3ème partie)

Nous vous proposons un nouvel article sur la contrefaçon de vin en Chine. Le présent article sera suivi d’autres articles sur ce thème, toujours publiés sur ChinePI.com.

Cet article que nous traduisons en français a été initialement rédigé en anglais par Alexander Bayntun-lees et publié sur le blog Your IP Insider.

Partie 1: les indications géographiques et la protection PI de votre Appellation d’Origine

Le vin a été classé par région presque tout au long de son histoire longue et variée, les Grecs anciens estampillaient déjà les amphores avec le sceau de la région de provenance, et des références au vin identifié par région sont trouvées tout au long de la Bible et autres textes religieux. Si cette tradition d’identification a perduré pendant l’Antiquité et au Moyen Age, elle ne fut protégée qu’en 1716, avec l’introduction de la région du Chianti en Italie, par décret du Grand-Duc de Toscane de l’époque.

Aujourd’hui, les concepts d’appellation et de terroir se sont répandus dans le monde entier. Pour le vin, la France possède plus de 300 “Appellation d’Origine Contrôlée” (AOC) [1], et l’Italie possède plus de 400 “Denominazione di Origine Controllata e Garantita” (DOCG) et “Denominazione di Origine Controllata” (DOC) [2]. Avec des systèmes similaires et de nombreuses variétés cultivées et protégées dans toute l’Europe et le reste du monde, l’appellation d’origine joue un rôle important dans la classification des vins, ainsi que dans le choix du consommateur. En conséquence, la protection de l’intégrité de ce système de classification est d’une importance primordiale pour les producteurs, les distributeurs, les détaillants, et bien sûr, les consommateurs.

L’appellation d’origine est protégée par les principes juridiques associés aux Indications Géographiques (IGs). De la même manière que pour les marques, les Indications Géographiques sont des signes distinctifs utilisés pour distinguer l’origine des marchandises, permettant ainsi aux consommateurs d’associer avec précision une qualité ou une réputation particulière avec les produits en question.

Les Indications Géographiques diffèrent cependant des marques car au lieu de protéger les droits d’un seul producteur, elles protègent ceux de toute une catégorie de producteur, en fonction de leur situation géographique et de la méthode de production utilisée. Les Indications Géographiques appartiennent donc à tous les producteurs résidents qui respectent les lois spécifiques et les régulations établies pour assurer que le lien effectué par le consommateur entre la qualité, la réputation et l’origine du vin soit préservé. [3]

Initiatives d’Indications Géographiques de l’Union européenne

L’Union Européenne possède deux marques collectives enregistrées en Chine qui sont la marque pour les Appellation d’Origine Protégée (AOP), et celle pour l’indication géographique protégée (IGP) [4].

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Une marque AOP identifie un vin comme étant originaire d’une ville, d’une région ou d’un pays particulier, qui a des caractéristiques qui sont particulièrement liées au lieu d’origine par des facteurs naturels ou humains inhérents au lieu, et qui est produit, transformé et préparé dans cette zone géographique définie.

Les produits AOP sont liés au territoire, ils doivent donc être produits, transformés et préparés dans une zone géographique spécifique.

La qualité ou les caractéristiques du produit doivent être dues essentiellement ou exclusivement au milieu géographique comprenant les facteurs naturels et humains inhérents au milieu, c’est-à-dire, le climat, la nature du sol et le savoir-faire local. Des exemples de vins AOP sont les vins produits et réalisés à Bordeaux, en Alsace, à Gavi, et à Cava.

Une marque IGP protège les noms des produits originaires d’un lieu, d’une région ou d’un pays spécifique, qui sont reconnus pour leur qualité, leur réputation ou autre caractéristique essentiellement attribuable à leur zone géographique définie. Le label IGP marque également les produits comme étant produits et / ou transformés dans la zone en question.

Contrairement aux produits AOP où la qualité est fortement liée à l’origine, une telle connexion immédiate n’a pas besoin d’être établie pour que le produit puisse prétendre à la protection par IGP. Il suffit, en effet, que la réputation du produit, une qualité donnée ou une autre caractéristique puisse être attribuée essentiellement à une zone géographique déterminée. Le lien entre les caractéristiques et l’origine peut ne pas être aussi fort que celui existant pour les AOP. Des exemples de vins IGP sont les vins produits et réalisés en Val de Loire et à Alto Mincio.

Les listes complètes des dénominations AOP et IGP enregistrées sont disponibles sur la base de données E-Bacchus administrée par la Commission Européenne[5].

 

Publicité pour les vins AOP / IGP

La direction générale de l’agriculture et du développement rural (DG AGRI) de l’Union Européenne mène une campagne de promotion des produits alimentaires et de boissons européennes avec des indications géographiques appelées «saveurs de l’Europe». Actuellement en exploitation en Chine, le projet promeut activement les produits IGP / AOP en Chine à travers une série de présentations et de réunions avec le gouvernement local et les acheteurs.

Le système est ouvert à tous les producteurs de produits avec une indication géographique et il représente un excellent moyen d’obtenir une exposition gratuite sur le marché chinois. Pour plus d’informations sur la façon de participer, cliquez ici.

 

Indications Géographiques en Chine

La Chine fournit une protection pour les indications géographiques à travers sa loi sur les marques en tant que marque collective ou certifiée, ce qui donne le même niveau de protection juridique et économique que pour toute autre marque. Les indications géographiques peuvent être enregistrées avec l’Administration générale de la Supervision de la Qualité, l’Inspection et la Quarantaine (AQSIQ) en tant que marques indiquant l’origine géographique et / ou la qualité de la production.

Les indications géographiques peuvent également être enregistrées en Chine par l’organisme de régulation des indications géographiques de la région auprès de l’Office des marques de la Chine (CTMO) en tant que marques collectives. Beaucoup de régions viticoles ont déjà franchi cette étape et les appellations qui bénéficient déjà d’une protection en Chine, incluent Champagne, Cognac, Napa Valley, Porto, Prosecco, et bien d’autres, cependant la majorité des régions ne sont pas encore inscrites.

Pour celles qui ne sont pas encore enregistrées, les producteurs peuvent encourager leur organisme de régulation des indications géographiques régional à faire une demande de marque collective qui doit répondre aux exigences suivantes :

  • La demande doit préciser que la demande est pour une marque collective ou une marque de certification.
  • La demande doit être présentée en chinois par un agent des marques chinois représentant l’organisme de régulation des indications géographiques régional auprès de l’Office chinois des marques.
  • Pour un enregistrement réussi, les indications géographiques doivent déjà bénéficier d’une protection juridique dans leur pays d’origine.
  • L’organisme de régulation faisant la demande de marque collective ou de certification doit également être l’organisme qui réglemente cette indication géographique dans le pays d’origine.

Enfin, il est recommandé que les organismes de régulation des indications géographiques enregistrent également une traduction en chinois de leur marque afin d’assurer une protection complète. Le ministère chinois du Commerce a publié une liste des traductions officielles des termes viticoles qui comprend de nombreuses régions et producteurs, ces demandes devant refléter celles de la langue d’origine de la marque collective / de certification.

Une fois que les indications géographiques sont enregistrées en Chine, elles jouissent de la même protection qu’une marque et peuvent être utilisées en conséquence. Comme pour les marques, il est important de surveiller le marché afin d’identifier toute violation de vos indications géographiques et d’agir contre les utilisateurs illégitimes de votre marque collective.

Toute partie intéressée peut demander l’aide d’organes administratifs de la Chine pour faire cesser la contrefaçon. Des actions telles que des raids dans les installations de production, des amendes contre les contrefacteurs, ainsi que la détention et la destruction des marchandises contrefaisantes, sont autant de solutions envisageables. Un litige civil peut également être engagé et entraîner des dommages-intérêts au profit du demandeur. Comme ces actions peuvent être exercées par toute partie concernée, plusieurs producteurs d’indications géographiques peuvent partager les charges financières nécessaires pour former de telles actions devant les tribunaux chinois, rendant ainsi les litiges comme une option beaucoup plus abordable par rapport aux litiges civils individuels.

[1] http://admi.net/jo/20040801/AGRP0401637A.html

[2] http://admi.net/jo/20040801/AGRP0401637A.html

[3] http://www.youripinsider.eu/guest-expert-davide-follador-gis-china-today/

[4] http://ec.europa.eu/agriculture/quality/schemes/index_en.htm

[5] http://ec.europa.eu/agriculture/markets/wine/e-bacchus/index.cfm?event=pwelcome&language=EN

Le dossier spécial « In Vino Veritas » est organisé par Alex Bayntun-Lees, Directeur de projet au sein du China IPR SME Helpdesk

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Traduit de l’anglais vers le français par Romain PERRINE, du cabinet LLRllr_new

L’action administrative, une mesure efficace contre la contrefaçon

A part recourir à des actions judiciaires, il existe en Chine un autre moyen efficace et également bien utilisé pour lutter contre la contrefaçon de marque, il s’agit de l’action administrative.

En effet, la législation chinoise donne un pouvoir particulier à des administrations locales (plus précisément des administrations de commerce et d’industrie au niveau municipal) pour lutter contre les actes de contrefaçon de leurs ressorts administratifs.

Ces administrations peuvent décider d’entreprendre des actions Ex Officio, lorsque les actes de contrefaçon sont détectés par les officiers administratifs, ou bien elles peuvent à agir à la demande des titulaires de droits de propriété intellectuelle. Pendant ces actions administratives, la loi chinoise donne les pouvoirs aux officiers de :

  • Approcher les personnes impliquées dans la contrefaçon ;
  • Inspecter sur le lieu de la contrefaçon, y compris consulter des documents y relatifs, tels que des factures, des documents comptables, des contrats, etc. ;
  • Saisir, confisquer voire détruire les produits de contrefaçon ;
  • Ordonner la cessation des actes de contrefaçon ;
  • Infliger des amendes jusqu’à 5 fois le montant du chiffre d’affaires réalisé par les actes de contrefaçon ;
  • Transférer l’affaire à la police, lorsque les actes de contrefaçon atteignent le seuil d’une sanction pénale.

Afin d’illustrer l’ampleur de ces actions administratives, vous trouverez ci-après quelques chiffres de cette année, divulgués par l’Administration nationale de commerce et d’industrie :

Jusqu’à la fin juin 2015, l’ensemble du système de l’Administration de commerce et d’industrie a enregistré 23 900 affaires portant atteinte au droit de la propriété intellectuelle et concernant la fabrication et la commercialisation des produits de contrefaçon et de mauvaise qualité, dont 21 400 ont été clôturées. Le montant total impliqué dans ces affaires s’élève à 380 millions CNY (environ 56 millions euros).

Plusieurs raids spécifiques sont lancés par des administrations de commerce et d’industrie à la fois dans les villes développées et à la campagne. Il s’agit par exemple de la lutte contre la contrefaçon sur Internet et de la protection des indications géographiques. Certains raids sont focalisés sur les produits destinés à la purification de l’air et de l’eau potable, ainsi que sur la qualité des produits utilisés par les enfants.

Plus particulière, la lutte contre les contrefaçons sur Internet a porté des fruits : plus de 240 000 sites Internet ont été contrôlés ; 532 ont été obligés de se corriger ; 21 ont été fermés ; 28 999 annonces concernant les produits illégaux ont été supprimées ; 6 153 inspections sur terrain ont été réalisées.

Par ailleurs, parmi l’ensemble des affaires enregistrées, 126 ont atteint le seuil de qualification de crime, et donc ont été transférées à la juridiction pénale. Le montant impliqué dans ces affaires pénales s’élève à 57 950 000 CNY (environ 8 510 000 euros ) ; 237 sites de contrefaçon sont fermés.

Quant aux affaires relatives à la contrefaçon de marque, 10 873 affaires ont été enregistrées au niveau national, 9 914 ont été clôturées, avec un montant total impliqué de 150 millions CNY (environ 22 millions d’euros).

Il est à noter que les administrations chinoises n’ont pas de pouvoir pour attribuer des dommages et intérêts aux titulaires des droits. Néanmoins, la voie administrative, connue par sa rapidité et son efficacité, constitue une véritable arme pour lutter contre la contrefaçon en Chine en complément de la voie judiciaire.

Une grande banque chinoise défiée par la Cour américaine

Un juge new-yorkais a ordonné récemment à une banque chinoise, « Bank of China », de lui fournir des informations détaillées sur les comptes bancaires de personnes accusées d’avoir vendu des contrefaçons de sacs et portefeuilles de la marque Gucci aux Etats-Unis, pour une valeur estimée à plusieurs millions de dollars. Cette décision pourrait avoir une influence sur la capacité de la Cour américaine à récolter des informations sur des activités illégales auprès des banques chinoises.

Selon les enquêtes américaines et européennes sur ce sujet, les banques chinoises sont parfois des refuges pour le blanchiment massif et les contrefacteurs, ces derniers se servant régulièrement de ces grandes banques pour détourner les profits réalisés sur le sol américain vers des pays éloignés et difficilement atteignables par la justice occidentale.

Les banques chinoises, quant à elles, se sont fortement opposées à cette décision, considérant que la demande consistant à rendre publiques les informations de leurs clients est une atteinte à leur souveraineté.

Selon le juge américain Richard Sullivan, la Cour américaine a la compétence pour faire ordonner une telle mesure à Bank of China, cette dernière ayant quatre agences aux Etats-Unis et prétendant être le meilleur choix pour les transferts de dollars américains de et vers la Chine. Par ailleurs, il a mentionné dans sa décision du 29 septembre 2015 que «demander à Gucci de déclencher une telle procédure en Chine serait très long et surtout, risquerait de n’aboutir à aucun résultat».

Il est clair qu’une telle décision, si elle était confirmée en appel, pourrait être intéressante pour toutes les victimes, sur le sol américain, de contrefaçons venant de Chine. En effet, alors que l’obtention de preuves de la contrefaçon peut être une étape critique dans un procès en contrefaçon, de telles preuves peuvent s’avérer délicates à obtenir en Chine lorsque le titulaire de droits se trouve aux Etats-Unis, tout particulièrement les preuves concernant des données comptables, qui sont connues pour être difficiles à obtenir. Aussi, les informations que pourraient fournir les banques chinoises deviendraient des données précieuses, non seulement faciles à obtenir, mais en outre éclairantes concernant les revenus du contrefacteur présumé.

Néanmoins, relevons d’une part que la décision est susceptible d’appel, d’autre part que l’on peut s’attendre à ce que Bank of China soit réticente à donner une suite, car les banques chinoises essayeront de fournir le minimum d’informations.

L’actualité récente semble en fait donner raison à ces craintes : un juge américain a déclaré le 24 novembre 2015 que Bank of China risquait une amende du fait qu’elle refuse de fournir les informations. En effet, Bank of China soutient qu’elle ne peut le faire, sans quoi elle ferait infraction au droit chinois de la vie privée. Bank of China soulève par ailleurs une incompétence du tribunal de Manhattan.

Un risque serait donc que la décision de la Cour américaine, favorable aux ayants droit, ne brille nulle part ailleurs que sur le papier. Mais il y a fort à parier que la justice américaine ne restera pas sans réponse non plus.

Attendons donc la suite.

Article rédigé par Yifan ZHANG, du cabinet LLRllr_new

La contrefaçon de vin en Chine (2ème partie)

Voici la 2ème partie, faisant suite à notre article (1ère partie) sur la contrefaçon de vin en Chine. Le présent article sera suivi d’autres articles, toujours publiés sur ChinePI.com.

Cet article que nous traduisons en français a été initialement rédigé en anglais par Alexander Bayntun-lees et publié sur le blog Your IP Insider.

Bodega Branding: Les Comment, Quoi, Quand et Pourquoi de la protection des Droits de Propriété Intellectuelle (DPI) du vin.

Dans notre dernier article nous faisions l’éloge de la croissance et de la prospérité de l’industrie du vin en Chine, motivé par les chiffres impressionnants de la croissance industrielle et de la consommation de vin en Chine ces dernières années. Celle-ci a été quelque peu tempérée par les histoires quelque peu tragiques du développement sans entrave d’une industrie contrefactrice parasite qui continue à saper les profits des producteurs de vin, dégrade des réputations, et dans certains cas nuit même aux consommateurs.

Aujourd’hui cependant nous allons sonner une note plus positive, et regarder comment les producteurs et distributeurs peuvent utiliser les cadres établis de la protection des DPI entretenus par la République Populaire de Chine (RPC) et défendre la réputation de leurs produits.

Mesures Anti-Contrefaçons Traditionnelles

Sceaux d’inviolabilité, hologrammes et autres techniques d’authentification sont depuis longtemps utilisés par les vignerons pour confirmer, à leurs consommateurs, l’authenticité de leurs produits. Malheureusement, les contrefacteurs ont travaillé depuis presque aussi longtemps pour mettre au point des copies de ces dites mesures préventives et, en conséquent, elles n’ont guère fait plus que ralentir les progrès des contrefacteurs pour copier des nouveaux produits.

En fait, même si les consommateurs ont l’envie ou l’opportunité de vérifier ces indicatifs, la sophistication des contrefacteurs a atteint le point où les producteurs eux-mêmes ont des difficultés pour identifier les faux, et doivent se reposer sur des tests en laboratoire pour identifier les contrefaçons.

Producteurs et distributeurs ne peuvent plus se reposer sur les mesures physiques traditionnelles seuls pour combattre la contrefaçon, et doivent aussi profiter des autres outils à leur disposition.

Marques Déposées

Les marques ont été utilisées comme des certificats d’origine pour les producteurs de vin depuis le 18ème siècle. A cette époque, le roi Louis XV ordonna aux fabricants des Côtes Du Rhône de marquer leur fût avec un simple «CDR» avant exportation dans le but d’éliminer les fraudes. Heureusement, pour le commerce du vin actuel, le droit des marques modernes est un peu plus complexe et offre une protection étendue pour les propriétaires de marques, leur garantissant le droit exclusif de l’usage de leur marque dans le domaine de leur commerce.

La Chine offre aux producteurs et distributeurs une protection globale des droits pour les marques conformément au droit des marques de RPC, mais aussi au droit pénal. Comme dans L’UE, les marques en Chine ont le rôle spécifique et principal de différencier les marchandises et les services d’un producteur de ceux d’un autre producteur. Le signe peut être composé de mots, figures, lettres, nombres, combinaison de couleurs, ou toute combinaison de ces caractéristiques. Il faut néanmoins se souvenir que la Chine utilise un système du premier déposant (first-to-file) pour les DPI, qui est strictement appliqué, de telle sorte qu’il est toujours sage d’enregistrer vos marques et en fait tout autre DPI aussitôt que possible pour éviter les possibilités de détournement, des marques déjà répandu dans l’industrie du vin en Chine.

La Chine autorise aussi le dépôt de marques en trois dimensions, potentiellement ce type de dépôt devrait être particulièrement utilisé dans l’industrie du vin pour lutter contre la contrefaçon dans les années à venir. Comme nous l’avons évoqué dans notre article précédent, la contrefaçon des étiquettes de vin est devenue courante ces dernières années. Contrefaire du vin dans des bouteilles génériques est un processus simple et peu coûteux, nécessitant seulement au contrevenant de ré-étiqueter les bouteilles existantes, ou de transvaser le vin dans leurs faux nouvellement étiquetés. Contrefaire une bouteille de forme distinctive demande cependant au contrefacteur un coût prohibitif, requérant qu’il trouve et paie un fabricant de bouteille pour produire les bouteilles contrefaites pour lui et partage les risques légaux si l’infraction était découverte.

En utilisant une forme de bouteille distinctive, par exemple avec l’emblème ou le nom du producteur moulé dans le verre, l’ayant-droit peut simultanément rendre la contrefaçon plus difficile, et acquérir une protection légale supplémentaire en souscrivant pour une marque 3D. Cette protection a déjà été utilisée avec succès contre des contrefacteurs de boisson en Chine, avec Hennessy et Kraft foods qui ont gagné des procès contre des potentiels contrefacteurs devant des tribunaux chinois.

Les titulaires de droits peuvent aussi réfléchir au fait de choisir une version en chinois de la marque. C’est important car en l’absence de traduction officielle, les consommateurs chinois en choisiront probablement une eux-mêmes, comme par exemple Quakers Oats (老人牌, ou « old man oats« ) et Ralph Lauren (三脚马, ou « le cheval à trois pattes »). Dans des cas extrêmes, l’échec pour enregistrer une marque en langue chinoise peut amener les titulaires de droits à être poursuivis par les pirates, un sort récemment subi par New Balance, pour quelques 98 millions de RMB chinois.

Le China IPR SME Helpdesk a écrit un guide sur comment choisir une marque en Chine se trouvant sur son site web, néanmoins il est recommandé que les ayants droit recherchent de l’aide localement lors du choix pour éviter de choisir par inadvertance un nom inapproprié ayant un second sens embarrassant.

Une fois déposées, les marques en Chine disposent d’une protection indéfinie, sujette à une taxe de renouvellement payée tous les dix ans, et donnent aux titulaires le droit exclusif d’utiliser leur marque pour des gains commerciaux. Les demandes peuvent être effectuées soit auprès du China Trade Mark Office (CTMO) directement, soit auprès de l’office local du titulaire via le système Madrid. Généralement, l’enregistrement des marques liées au vin coûtent quelques centaines d’euros seulement en incluant les frais de mandataire et la protection recommandée pour : les produits viticoles (classe 33), les commerces en ligne, la vente et la distribution (classe 35), les contenants, boîtes, bouchons (Classe 20), et verres à vin (classe 21).

Droits d’auteur

Les droits d’auteur en Chine peuvent fournir aux titulaires des droits un certain nombre de droits supplémentaires qui peuvent compléter la protection par marque. Le droit d’auteur protège tous travaux créatifs, y compris toutes images ou textes fournis sous la forme de prospectus ou de documents publicitaires. On a déjà vu des contrefacteurs simplement copier et coller de tels documents sur leurs propres sites internet et prospectus, renforçant ainsi l’apparente authenticité de leurs produits contrefaits. En utilisant les droits d’auteur toutefois, les titulaires de droit peuvent déjouer ces tentatives en exerçant leurs droits en combinaison avec toutes autres mesures. Les droits d’auteur peuvent aussi fournir un supplément de protection pour les formes d’étiquettes, la protection des formes, dispositions et images.

Comme en Europe, la protection des droits d’auteur en Chine est garantie après la création d’une œuvre protégeable, et il n’y a pas d’enregistrement nécessaire. Cependant, à cause de la difficulté pour prouver la possession devant les cours chinoises, il est souvent sage d’enregistrer tous droits d’auteur importants avant de les publier dans le pays.

Douane

Les autorités douanières de Chine fournissent aux producteurs et distributeurs de vin une autre arme pour lutter contre la contrefaçon. Contrairement à de nombreux pays, les douanes chinoises ont la possibilité de rechercher et de saisir les marchandises destinées à être exportées et les marchandises importées. Comme de plus en plus de vin contrefait chinois parvient jusqu’en Europe, l’utilisation efficace des procédures douanières est l’étape suivante logique pour les producteurs et distributeurs de vin en terme de protection de leur marché local.

A ce jour, l’enregistrement des marques auprès de la General Administration of Customs (GAC) est gratuit. Une fois que les marques sont enregistrées, les autorités recherchent activement les contrefaçons, les saisissent, et informent les titulaires de droits. De ce fait, le chemin à parcourir entre la découverte et la destruction des produits contrefacteurs est court, et les titulaires de droits n’ont besoin que de payer les frais d’entrepôt si des contrefaçons sont découvertes.

Une recherche récente des enregistrements en douane, menée par L’expert du Helpdesk Paolo Beconcini, a montré que seulement 57 marques de vin sont actuellement enregistrées auprès de la GAC, parmi lesquelles seulement peu sont européennes. De ce fait, il y a une énorme opportunité manquée par les producteurs pour profiter de cet élément de protection gratuit et efficace offert par les autorités chinoises.

Le China IPR SME Helpdesk a réalisé un guide sur la protection douanière des DPI en Chine, et fournit des conseils gratuits sur mesure via sa helpline.

Résumé

Quand les DPI ci-dessus sont enregistrés et la protection garantie, les titulaires de droits peuvent alors commencer à faire appliquer leurs droits contre les contrefacteurs et autres opportunistes tels que les squatteurs de nom de domaine. De plus, l’enregistrement des marques permet aux titulaires de droits d’émettre des demandes de retrait aux services de vente en ligne tels que Taobao, qui connaissent une augmentation du nombre de produits contrefaits depuis quelques années. C’est particulièrement important car les consommateurs chinois utilisent de plus en plus ces magasins en ligne pour l’achat de vin, étant donnée que 2 des 5 plus larges revendeurs en Chine ne commerçant que sur des plateformes en ligne.

Dans notre prochain article écrit par le spécialiste de l’enquête et de l’application de la loi Nick Bartman, nous débattrons sur comment ces droits enregistrés peuvent être utilisés pour combattre les contrefacteurs en Chine.

Nous vous prions de garder à l’esprit que les régimes de protection sont sensiblement différents à Taiwan, Hong Kong et Macao donc soyez certains de vérifier à deux fois que votre propriété intellectuelle est protégée avant de faire des affaires dans ces régions.

Le dossier spécial « In Vino Veritas » est organisé par Alex Bayntun-Lees, Directeur de projet au sein du China IPR SME Helpdesk

China Helpdesk

The China IPR SME Helpdesk is a European Union co-funded project that provides free, practical, business advice relating to China IPR to European SMEs. To learn about any aspect of intellectual property rights in China, including Hong Kong, Taiwan and Macao, visit our online portal at www.china-iprhelpdesk.eu. For free expert advice on China IPR for your business, e-mail your questions to: question@china-iprhelpdesk.eu. You will receive a reply from one of the Helpdesk experts within three working days. The China IPR SME Helpdesk is jointly implemented by DEVELOPMENT Solutions, the European Union Chamber of Commerce in China and European Business Network (EBN).

 

Traduit de l’anglais vers le français par Sylvain GAUTHIER, du cabinet LLRllr_new

 

Contrefaçon de vin en Chine : infographie

Dans le cadre de la publication du dossier spécial sur le vin, voici une infographie réalisée et traduite en français par le bureau China IPR SME Helpdesk sur la consommation et la contrefaçon de vin en Chine.

Contrefaçon de vin Chine

Le dossier spécial « In Vino Veritas » est organisé par Alex Bayntun-Lees, Directeur de projet au sein du China IPR SME HelpdeskChina Helpdesk

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