Réduire ses impôts en Chine grâce aux brevets ?
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Réduire ses impôts en Chine grâce aux brevets ?

Aperçu des avantages fiscaux liés au dépôt de brevets en Chine

Les droits de propriété intellectuelle (PI), et notamment de brevet, ont de nombreux avantages, parmi lesquels le plus important est bien entendu de protéger les fruits de l’innovation des entreprises.

En Chine, il existe un autre avantage au dépôt de brevets, qui est bien connu des Chinois mais pas forcément des étrangers : les titres de PI d’une entreprise jouent un rôle extrêmement important dans l’obtention du statut dit “HNTE” (pour “High and New Technology Enterprise”), grâce auquel l’entreprise peut bénéficier d’une forte réduction d’impôt sur le revenu, qui passe du taux habituel de 25 % à un taux de 15 %, selon la loi fiscale chinoise.

Il s’agit d’une politique fiscale très incitative en faveur des entreprises innovantes. Le nombre d’entreprises bénéficiant de ce statut en Chine est passé de 49 000 il y a plus de dix ans à 330 000 en 2021, et le montant des investissements en recherche et développement (R&D) de ces entreprises représente 70 % de celui des entreprises chinoises. Nous vous proposons donc un tour d’horizon des avantages fiscaux dont les entreprises peuvent bénéficier en raison de leurs dépôts de brevets.

Bénéfice du statut HNTE

Pour qu’une entreprise soit considérée comme une entreprise HNTE, il est nécessaire que son activité concerne une « core IP ». Il n’existe pas de définition claire de ce terme, mais on pourrait traduire cette exigence par le fait qu’il faut que l’activité de l’entreprise soit centrée sur des innovations techniques qui ne sont pas mineures.

En particulier, son activité doit se situer dans l’un des huit domaines technologiques concernés (électronique et information, biologie et nouvelle médecine, aviation et aérospatial, nouveaux matériaux, services de haute technologie, nouvelles énergies et économie d’énergie, ressources et environnement, et transformation des secteurs traditionnels). Ce statut doit être renouvelé tous les trois ans.

Parmi les autres conditions pour obtenir ce statut, il semblerait qu’il faille remplir les critères suivants : être propriétaire de la propriété intellectuelle relative à la technologie cœur de l’entreprise, résider en Chine depuis au moins un an, avoir au moins 10 % de son personnel dans les activités de R&D, réserver un certain pourcentage de ses revenus à la R&D, employer du personnel qualifié, etc.

La capacité d’innovation de l’entreprise est un des aspects importants pris en compte lors de l’examen du dossier HNTE. En effet, on évalue cette capacité en donnant des points à quatre indices : la propriété intellectuelle (notée de 0 à 30 points), la capacité à transformer les réalisations scientifiques et technologiques (notée de 0 à 30 points), le niveau d’organisation et de gestion de la R&D (noté de 0 à 20 points), et la possibilité de croissance de l’entreprise (notée de 0 à 30 points). Il est nécessaire d’avoir un total plus de 70 points pour obtenir le statut HNTE.

En ce qui concerne l’indice “propriété intellectuelle”, sont examinés plus précisément les sous-indices suivants :

  1. le niveau d’avancement des technologies brevetées (de 0 à 8 points)
  2. le rôle de la PI dans le produit/service principal de l’entreprise (de 0 à 8 points)
  3. le nombre de titres de PI détenus (de 0 à 8 points)
  4. le mode d’obtention des titres de PI (de 0 à 6 points)
  5. la participation éventuelle de l’entreprise à la préparation de normes nationales, normes de l’industrie ou encore méthodes d’essai et spécifications techniques (bonus jusqu’à 2 points)

Relevons que les titres de PI pris en compte pour l’obtention du statut HNTE sont ceux délivrés/enregistrés en Chine et ceux bénéficiant des droits de licence exclusif dans le monde entier pendant plus de 5 ans. Naturellement, ces titres doivent être en vigueur au moment du dépôt du dossier de qualification HNTE.

Les titres acceptables sont classés en deux catégories :

  • Catégorie I : brevets d’invention (y compris les brevets de défense nationale), nouvelles variétés végétales, variétés de cultures de classe nationale, nouveaux médicaments nationaux, variétés nationales de médecine chinoise, droits exclusifs de configuration de circuits intégrés, etc.
  • Catégorie II : brevets de modèles d’utilité, brevets de dessins et modèles, droits d’auteur de logiciels, etc. (les marques étant donc exclues).

Des points sont attribués à l’entreprise en fonction du nombre et de la catégorie des titres qu’elle détient :

  • supérieur ou égal à 1 titre de catégorie I : 7-8 points
  • supérieur ou égal à 5 titres de catégorie II : 5-6 points
  • 3 ou 4 titres de catégorie II : 3-4 points
  • 1 ou 2 titres de catégorie II : 1-2 points

Il est à noter que les titres de catégorie II ne peuvent être utilisés qu’une seule fois dans l’obtention du statut HNTE tandis qu’il n’y a pas de limite pour les titres de catégorie I.

En outre, si certains des titres sont issus d’innovations propres à l’entreprise, cette dernière peut acquérir jusqu’à 6 points dans le cadre de l’indice 4 relatif au “mode d’obtention des titres de PI”. Si, au contraire, il n’y a aucun titre de ce type (c’est-à-dire uniquement des titres cédés, offerts ou obtenus grâce à une acquisition), l’entreprise pourra obtenir un maximum de 3 points pour le même indice.

Il importe donc à l’entreprise d’être en possession de brevets, idéalement des brevets d’invention issus de sa propre R&D et couvrant des technologies avancées. Plus le nombre en est élevé, plus les chances d’obtenir la qualification HNTE augmentent.

Autres bénéfices fiscaux à considérer

Une société peut également obtenir le statut d’ATSE (pour “Advanced Technology Service Enterprise”). Pour ce statut, les critères sont moins stricts et ne sont pas limités aux cas dans lesquels la propriété intellectuelle se trouve au cœur de l’activité.

Autre incitation fiscale très intéressante : il est possible de déduire 150 % de ses dépenses de R&D des revenus de la société. Il s’agit de ce que l’on appelle la « super-déduction ». Pour en bénéficier, il n’est a priori pas nécessaire d’avoir une activité dans des domaines technologiques précis et les critères semblent relativement faciles à réunir.

Est déductible dans ce cadre tout ce qui améliore les connaissances de l’entreprise. Il ne s’agit là pas forcément de connaissance technique universelle, contrairement à ce que l’on a tendance à croire. En effet, dès que l’on travaille sur un produit, un procédé, un emballage, un logiciel, ou encore une saveur ou une recette, des dépenses sont probablement déductibles. Ainsi, un grand nombre de dépenses de l’entreprise peuvent être considérées comme des dépenses de R&D éligibles à des déductions fiscales, alors qu’il s’agit d’un poste de dépense souvent sous-estimé par les sociétés.

Concernant les procédures permettant de bénéficier des déductions, elles varient énormément selon les provinces et les villes. Aussi, il est important de se renseigner suffisamment tôt pour procéder aux déclarations à temps. Par exemple, la déclaration des dépenses n’est parfois possible qu’au mois de janvier, et si l’on ne déclare pas dans les temps, toute déduction fiscale peut être définitivement perdue pour l’année qui précède.

Ces déductions peuvent être combinées avec des subventions données par l’administration chinoise pour des brevets délivrés. Il n’existe plus de subventions applicables à des dépôts. Toutefois, le nombre de ces subventions est en train de diminuer, et elles ont même tendance à disparaître puisque le gouvernement chinois accorde désormais plus d’attention à la qualité des brevets qu’à la quantité. Là encore, il convient de se renseigner avant d’effectuer de telles démarches car les critères varient d’une ville à l’autre.

Pour plus d’informations et pour préparer un dossier d’obtention du statut HNTE, il est recommandé d’être accompagné par un spécialiste de la fiscalité chinoise ou du statut HNTE.

Article rédigé par Mei TAO, Clémence VALLÉE-THIOLLIER