Une nouvelle affaire de transformation de marque
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Une nouvelle affaire de transformation de marque

Les tribunaux chinois soutiennent TOMMY HILFIGER dans son action en invalidation d’une marque similaire à son logo emblématique

Nous avions déjà évoqué cette nouvelle tendance de la part des déposants frauduleux de marques en Chine, consistant à déposer une marque, puis à la transformer de façon à ce qu’elle se rapproche d’une marque connue. L’affaire 3M dont notre analyse est disponible ici en est un bon exemple. Plus récemment, c’est la société TOMMY HILFIGER qui a été la victime dans une situation similaire, et les tribunaux chinois ont soutenu son action en invalidation à l’encontre de la marque contestée.

Revenons tout d’abord sur les faits de cette affaire. Une entreprise chinoise a obtenu l’enregistrement de la marque contestée n°12396976 (voir spécimen ci-dessous) désignant le produit « ceintures ». Le titulaire l’a par la suite cédé à une entité tierce.Marque contestée

La société cessionnaire a utilisé cette marque, non pas en noir et blanc comme elle a été enregistrée mais en couleurs, ce qui a pour effet d’imiter l’une des marques enregistrées par TOMMY HILFIGER, son logo emblématique.Marque figurative de TOMMY HILFIGER

Bien que TOMMY HILFIGER n’ait pas désigné le produit « ceintures » lors de l’enregistrement de cette marque en Chine, la société américaine a tout de même déposé une action en invalidation contre la marque contestée et a obtenu gain de cause de la part des tribunaux chinois.

Analyse de la décision

Alors même que, dans la première étape de la procédure, la CNIPA a rejeté l’action en invalidation de TOMMY HILFIGER, la Cour de PI de Pékin, et par la suite, la Haute Cour de Pékin ont annulé la décision de la CNIPA et soutenu la demande de TOMMY HILFIGER.

Leurs décisions, qui citent les articles 31 et 32 de la loi chinoise sur les marques, sont fondées sur les points suivants :

  1. Le style de création et la composition de la marque contestée la rendent similaire à la marque figurative de TOMMY HILFIGER (ainsi qu’aux autres marques en noir et blanc enregistrées par la société américaine) et son effet visuel est encore plus proche de celui de ces marques après l’ajout des couleurs. Par conséquent, le critère de similarité des marques est rempli.
  1. Le produit « ceintures » est considéré comme similaire au produit « vêtements ». Il y a donc similarité de produits. 
  1. Les marques de TOMMY HILFIGER sont célèbres pour les produits « vêtements ».
  1. TOMMY HILFIGER a acquis une certaine réputation pour le produit « ceintures », par conséquent, l’enregistrement de la marque contestée viole l’article 31 de la loi des marques qui protège les marques bénéficiant d’une certaine réputation.
  1. La partie adverse a agi de mauvaise foi.

Relevons qu’afin de juger la similarité des marques ainsi que celle des produits désignés, les juges se sont fondés sur l’article 31 de la loi et ont pris en compte un certain nombre de facteurs tels que le caractère distinctif et la notoriété de la marque de TOMMY HILFIGER. Le risque de confusion, qui est un critère décisif dans l’évaluation de la similarité, a également été pris en considération.

A l’occasion de cette affaire, rappelons qu’en juin 2020, la CNIPA a publié une série de directives intitulée « Critères de contrefaçon de marque » (voir ici notre article publié à cette occasion). Dans le cadre de ces directives, elle indiquait notamment qu’une marque enregistrée en noir et blanc pouvait être librement utilisée en couleurs mais que, lorsque les couleurs étaient utilisées pour imiter ou copier des marques déposées par des tiers, et que cette utilisation est susceptible de prêter à confusion, alors cette utilisation pouvait être considérée comme une contrefaçon de marque.

Une disposition qui n’a probablement pas influencé l’issue de notre affaire puisque la décision TOMMY HILFIGER date d’après la publication de la CNIPA, mais qui semble avoir été spécialement pensée pour elle.

Article rédigé par DONG Li de LLR China